Travaux dans mon appartement : autorisation AG, Mairie ou rien ?
- bclinfos
- 31false46 GMT+0000 (Coordinated Universal Time)
- 7 min de lecture

Je projette des travaux dans mon appartement, dans quels cas faut-il obtenir l’autorisation de la copropriété ou de la mairie ?
En cas de refus de l’assemblée générale, le juge peut vous autoriser à faire vos travaux.
Si vous projetez de faire des aménagements ou de rénover votre appartement, sachez que vous devez respecter le règlement de copropriété et les droits des copropriétaires. Voici ce qu’il faut vérifier avant de vous lancer.
Vous pensez peut-être que les travaux que vous faites dans votre appartement ne regardent personne d’autre que vous. Détrompez-vous ! Vous pouvez librement entreprendre de petits travaux et de menues réparations dans votre lot de copropriété, bien sûr : retapisser le mur de votre salon, changer les meubles de la cuisine équipée ou faire une ouverture dans une cloison légère… Mais dès qu’il s’agit d’envisager des travaux plus sérieux, comme toucher à un mur porteur, par exemple, vous êtes dans l’obligation de demander l’autorisation des autres copropriétaires. Celle-ci devra être donnée au cours d’une assemblée générale (AG), qu’il vous faudra convoquer à vos frais, si jamais la date de l’AG annuelle déjà prévue ne coïncide pas avec votre planning de travaux.
Il arrive cependant que le règlement de copropriété autorise par avance certains travaux, sans qu’une AG ne soit nécessaire. La première chose à faire est donc de consulter ce document. Si vous n’y trouvez rien, alors il va falloir se référer à la loi pour déterminer si votre projet nécessite un vote.
30 ans
C’est le délai pendant lequel le syndicat des copropriétaires peut vous demander une remise en état des lieux après des travaux non autorisés sur une partie commune (art. 2227 du code civil).
Quels travaux font l’objet d’un vote en AG ?
Il existe quatre types de travaux privatifs pour lesquels un vote est impératif (art. 9 et 25 b de la loi n° 65-557 du 10.7.65).
Ceux qui modifient l’aspect extérieur de l’immeuble : par exemple, fixer une climatisation sur le mur de votre balcon ou de votre terrasse, créer ou modifier une ouverture vers l’extérieur, comme changer un volet, une fenêtre ou une porte (sauf à l’identique) ou fermer une loggia.
Ceux qui touchent les parties communes. C’est le cas si vous devez percer ou abattre un mur porteur, comme un mur de soubassement, de façade ou de refend, une conduite de cheminée, ou modifier un bout de palier. Cela vaut aussi pour les parties communes à usage privatif, par exemple un jardin dont vous avez l’usage exclusif (cass. civ. 3e du 23.1.20, n° 18-24.676). Il s’agit malgré tout d’une partie commune, aussi quels que soient les travaux que vous envisagez d’y faire (créer une terrasse, couler une dalle, etc.), vous devez demander formellement l’autorisation au syndicat des copropriétaires réunis en AG. Reste à savoir ce qu’est une partie commune. « La loi de 1965 en dresse une liste très précise, à l’article 3, mais celle-ci est supplétive de la volonté des parties. Cela signifie qu’il faut en priorité se référer au règlement de copropriété qui peut prévoir une définition différente des parties communes pour votre immeuble. Ce n’est que dans le silence du règlement, que vous pouvez vous reposer sur la définition légale », précise Pierre-Édouard Lagraulet, avocat spécialisé en droit immobilier.
Ceux qui portent atteinte aux droits des autres copropriétaires. Par exemple, si l’implantation de votre moteur de climatisation risque de gêner vos voisins par son bruit, ou la chaleur dégagée.
Ceux qui sont contraires à la destination de l’immeuble. Il s’agit par exemple de travaux susceptibles de fragiliser la structure de l’immeuble ou opérant un changement d’usage des lieux qui serait interdit. Par exemple, vous êtes propriétaire d’un lieu à usage d’habitation et souhaitez installer un tube d’extraction de fumées afin d’ouvrir un restaurant dans une copropriété qui interdit ce type d’activité.
Notez qu’un vote formel en AG n’est pas obligatoire dans les petites copropriétés, c’est-à-dire d’au maximum 5 lots (à usage d’habitation, de bureaux ou de commerces) ou dont le budget prévisionnel moyen est inférieur à 15 000 € sur les 3 dernières années. Il est ici possible de demander au syndic d’organiser une consultation informelle, écrite ou orale. Attention, dans ce cas, les travaux doivent être autorisés à l’unanimité (art. 41-12 de la loi de 1965).
Quelle majorité faut-il recueillir ?
La majorité requise dépend de l’importance de la décision soumise au vote. Le principe est que les travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble doivent être autorisés à la majorité absolue de l’article 25, c’est-à-dire à la majorité des voix de tous les copropriétaires, y compris des absents et non représentés à l’assemblée (les « défaillants ») et des abstentionnistes. Afin d’éviter les blocages, si après un premier vote, cette majorité n’est pas réunie, mais que le projet a tout de même emporté l’adhésion d’au moins un tiers des voix, alors l’assemblée revote, cette fois-ci à la majorité, dite « simple », de l’article 24. Cette dernière correspond à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance. Cela signifie qu’on ne tient pas compte des abstentionnistes (qui ne pourront d’ailleurs pas contester la délibération).
Si les travaux nécessitent l’annexion de parties communes, la majorité de l’article 25 ne suffit plus. Ils doivent être approuvés à la « double majorité » de l’article 26, c’est-à-dire avec au moins deux tiers des voix.

Notez enfin que le vote devra se faire à l’unanimité si votre projet porte atteinte aux conditions de jouissance des autres copropriétaires ou à la destination de l’immeuble. « Par conséquent, lorsque vous faites une demande d’autorisation de travaux à la majorité de l’article 25, vous devez toujours démontrer à la fois l’absence de nuisances et la conformité du projet à la destination de l’immeuble, si vous voulez éviter un vote à l’unanimité », conseille Me Lagraulet. Pour cela, vous aurez peut-être besoin de produire, en fonction des travaux, l’avis d’un bureau d’études techniques (BET) qui démontre par exemple l’absence d’atteinte à la structure de l’immeuble, ou l’absence de nuisances (acoustiques, olfactives, etc.). « Vous devrez expliquer de manière détaillée les travaux envisagés, avec des plans cotés, des précisions sur les emplacements, les coloris, etc., afin que l’assemblée puisse vérifier à quelle majorité devra se faire le vote et prendre une décision parfaitement éclairée », précise l’avocat.
Si toutes les conditions sont réunies et que, malgré tout, l’assemblée générale refuse d’autoriser vos travaux, vous pouvez saisir le tribunal judiciaire. Si le juge considère que le refus des copropriétaires est abusif, il pourra autoriser les travaux à leur place.
Mettez toutes les chances de votre côté avec les voisins
Il est fortement conseillé de préparer l’assemblée générale en amont. « J’ai la chance de vivre dans une petite copropriété où presque tous les copropriétaires sont occupants, donc j’ai pu faire du porte à porte et discuter avec chacun de mon projet avant la tenue de l’AG », explique Jacqueline qui, après avoir acquis un lot à l’étage inférieur au sien, a voulu les réunir. Dans les grandes copropriétés, le lobbying est plus délicat. Dans ce cas, il faut arriver bien préparé à l’AG, avec un dossier complet, en anticipant un maximum de questions qui pourraient vous être posées. Si vous réussissez à emporter l’approbation de vos voisins, montrez-vous reconnaissant au moment de l’exécution des travaux, en respectant au mieux leur tranquillité. Pour connaître les horaires et modalités de réalisation des travaux, référez-vous au règlement sanitaire départemental ou, dans le silence de ce texte, aux arrêtés municipaux pris par la commune.
Sans autorisation, vous risquez gros
Se passer d’autorisation est totalement déconseillé. « Vos travaux seraient en effet considérés comme irréguliers et le syndicat des copropriétaires pourrait demander leur dépose, le cas échéant, en référé, avec remise en état des lieux », met en garde Me Lagraulet. Lorsque la remise en état ou la démolition sont impossibles matériellement (destruction d’un escalier qui rendrait inaccessible un logement, par exemple) ou fragiliseraient la structure de l’immeuble (destruction de voûtes en béton dans une cave), le copropriétaire sera condamné à verser des dommages et intérêts à la copropriété.
Toute action visant à stopper les travaux ou à les faire démolir est possible pendant 5 ans, à compter du jour où les copropriétaires ont eu connaissance ou auraient dû avoir connaissance de ces travaux (art. 2224 du code civil). Notez que ce délai passe à 30 ans en cas d’empiètement sur les parties communes ou d’annexion de celles-ci (art. 2227), par exemple si vous avez refait la dalle d’une cour intérieure, ou intégré un bout de palier à votre logement en réunissant deux lots.
Il reste toutefois possible de tenter de faire régulariser des travaux a posteriori, lors d’une prochaine AG. Il se peut, par exemple, que vous n’en soyez pas l’auteur, qu’ils aient été réalisés de manière irrégulière par le précédent propriétaire, ou que vous ayez commencé à les exécuter en toute bonne foi, sans savoir qu’il fallait une autorisation. L’AG doit alors voter à la majorité requise selon la nature des travaux (voir tableau ci-dessous). Notez qu’en cas d’échec, vous n’avez pas de recours judiciaire.
Avez-vous besoin d’une autorisation de la mairie ?
Même si vous obtenez l’approbation de la copropriété, vous devrez, avant de réaliser certains travaux, déposer une demande d’autorisation d’urbanisme en mairie. Un permis de construire sera par exemple nécessaire pour tout agrandissement ou toute construction nouvelle de plus de 40 m2 en zone urbaine couverte par un plan local d’urbanisme (20 m2 ailleurs) ou pour certains équipements à partir d’une certaine taille (piscine, abri de jardin, serre, par exemple, dans une copropriété avec jardins à usage privatif). Vous pourrez, en revanche, vous contenter d’une déclaration préalable pour un changement de destination ou une modification de l’aspect extérieur du bâtiment (changement ou création d’une fenêtre, transformation d’un local commercial en habitation et inversement…).
Quoi qu’il en soit, autorisation d’urbanisme et autorisation de l’AG sont bien distinctes. Depuis 2007, vous n’êtes plus obligé de joindre à votre déclaration préalable ou à votre demande de permis de construire la copie de l’autorisation de l’AG. Et si le projet est rejeté par la copropriété et que vous faites malgré tout les travaux, ce sera à vos risques et périls. Peu importe que la mairie ait délivré une autorisation : le syndicat pourra agir en justice contre vous et demander une remise en l’état (Conseil d’État du 3.4.20, n° 422802).
Commentaires